Parce qu'on ne contrôle pas ceux qu'on déteste. (Edwin)

Gaspard avait conscience qu’il était quand même grand temps que les chasseurs reprennent du service et surtout, qu’ils agissent bien plus qu’ils ne l’avaient fait jusqu’à présent. Les chasseurs avaient bien fait quelques actions, mais concrètement ils n’avaient rien fait contre la magie réellement, ils n’avaient en tout cas pas fait d’action suffisamment fortes pour qu’on ait peur d’eux, pour que les êtres magiques décident de se cacher définitivement. Et c’était justement quelque chose que ces personnes méritaient, vivre dans la peur constante. Ils ne méritaient pas de vivre tout court en réalité, mais il était évident qu’ils ne pouvaient pas détruire toutes les personnes capables d’utiliser la magie instantanément, ils devaient y aller progressivement. Gaspard ne savait pas encore exactement comment les chasseurs allaient s’y prendre, mais il savait une chose cependant, il était important qu’il prenne les rênes. C’était déjà le cas avant que son père ne meure, parce qu’il était bien trop concentré sur son mariage et sa toute jeune épouse, mais maintenant avec son décès, c’était bien la preuve qu’il devait réellement prendre les choses en main.

Ce qu’il avait l’intention de faire, sincèrement, quand bien même il n’était pas complètement sûr de comment il allait gérer les choses. Il tenait à mener les chasseurs à leur gloire, faire payer à ces êtres magiques, mais en même temps il ne pouvait pas nier le fait qu’il avait quand même un grand attachement pour le roi et… le fait de mener les chasseurs, ça allait quand même à l’encontre des volontés du souverain. Bref, il ne savait pas exactement où il se rendait, mais ce qu’il savait, c’était qu’il devait mener les chasseurs et qu’il allait le faire. Qu’il détestait toujours autant les êtres magiques. Et qu’il était un chevalier de la table ronde et devait se rendre aux réunions. C’était en s’y rendant qu’il croisa la route d’un autre chevalier, l’un de ceux que le jeune homme ne parvenait pas à supporter, pour une seule raison : la magie. Edwin ne s’était jamais caché du fait qu’il était un être magique, et forcément le jeune homme ne pouvait pas du tout le blairer. En même temps, il n’y avait pas grand monde que Gaspard appréciait d’une manière générale, alors qu’en plus il y avait de l’histoire magique là-dessous, c’était pire que tout.

« Bonjour Sir Edwin. » Dit-il sans vraiment de conviction. Il n’avait pas spécialement envie de saluer cet homme, mais en même temps il ne pouvait pas faire n’importe quoi. Ils n’étaient pas seul, le jeune homme ne put s’empêcher de tourner d’ailleurs son regard vers d’autres chevaliers qui se trouvaient un peu plus loin. Il n’avait pas envie d’avoir (encore) des ennuis avec le souverain de Camelot parce qu’ils se prendraient la tête. Surtout que Gaspard devait se montrer le plus discret possible… il ne faudrait pas qu’on comprenne qu’il avait une dent contre les êtres magiques. « C’est toujours un plaisir de vous voir. » Ajouta-t-il d’un ton que Edwin ne pourrait que comprendre ironique, parce qu’il espérait surtout lui faire comprendre le contraire.

Le fait que Edwin prenne la peine de prononcer le « Sir » après son prénom, ça avait le don d’agacer prodigieusement Gaspard, même s’il savait bien que c’était justement dans le but de l’emmerder. Ce n’était pas comme s’ils ne savaient pas exactement ce qu’ils pensaient d’eux, ils avaient parfaitement conscience de ce qu’il y avait entre eux, même si forcément ils ne pouvaient pas réellement le montrer. Parce qu’il y avait quand même d’autres personnes dans le coin, parce qu’ils ne devaient pas se montrer trop virulent, au vu de la manière dont le roi lui même avait quand même décidé de les remonter quand il avait eu vent de leur querelle. Ils ne devaient pas faire de gaffe, ils devaient vraiment prendre sur eux, même si ça n’avait rien d’évident.

En tout cas, Gaspard comprenait parfaitement ce que les mots de Edwin voulaient dire, alors qu’il affirmait qu’il savait très bien ce que ça lui faisait de le voir. Oh, oui, sans doute la même chose que lui sans aucun doute. Et le pire, c’était que Edwin ne manqua pas d’en profiter, puisqu’ils se trouvaient présentement près d’autres chevaliers, puisqu’il passa une main autour de son épaule. Super... Gaspard se tendit, ne pouvant pas s’empêcher d’être tendu justement, mais il n’en montra rien pour autant. Sans doute que Edwin allait le comprendre, mais il ne voulait pas réellement que les autres chevaliers le devine, il devait faire profil bas, maintenant plus que jamais d’ailleurs. Parce qu’il ne devait surtout pas faire penser qu’il n’avait pas sa place dans les chevaliers de la table ronde, au contraire. Il était important qu’il soit à sa place, qu’on ne lui reproche rien, même si pour cela il devait faire en sorte de prendre sur lui auprès de Edwin qui ne manqua pas en prime d’en ajouter un peu plus en parlant de sa sœur. Comme si Gaspard avait réellement besoin qu’il lui parle de sa sœur, surtout au vu des circonstances actuelles. Doucement, le jeune homme parvint à se défaire de l’étreinte de son camarade chevalier, se forçant à afficher un large sourire sur le visage, histoire de « confirmer » le fait que tout allait très bien dans le meilleure des mondes.

« Je crains malheureusement que vous ne puissiez la voir avant un moment. » Répondit-il en aillant plus qu’envie d’insulter l’homme sous ses yeux, mais les oreilles ne manquaient pas de traîner malheureusement. « Notre famille traverse une période compliqué, elle a des préoccupations bien plus importantes. »

Pour ne pas dire que l’homme sous ses yeux n’avait pas intérêt à se rapprocher de sa sœur, parce qu’il était hors de question qu’il laisse une personne comme lui dans le sillage de Giselle. Mais en même temps, il n’avait pas spécialement envie de la voir avec qui que ce soit.

En soit, la mort du paternel Gabet ne signifiait pas que Giselle ne pouvait voir personne – cela dit, elle n’était pas non plus en forme –, mais ça offrait quand même une excuse au jeune homme concernant le fait que ce chevalier en particulier avait envie de la voir. Le jeune homme n’appréciait clairement pas Edwin (et ce dernier en avait conscience évidemment), il n’avait aucune envie de le voir tourner autour de sa sœur. Lui et n’importe qui en réalité, même si Gaspard avait bien conscience qu’il ne devrait pas se montrer aussi possessif avec sa sœur. Mais il n’y pouvait rien, le jeune homme avait beaucoup trop envie de la protéger. Même s’il prenait un peu trop la peine de gérer certaine chose pour elle…, c’était vraiment dans le but de la protéger. Enfin, dans tous les cas, concernant Edwin le jeune homme n’était pas du tout objectif. Il ne supportait pas ce jeune homme, ça ne l’aidait pas.

L’homme affirma tout de même qu’il était navré pour leur père. Gaspard ne savait pas vraiment si c’était des paroles sincères ou non, il ne pouvait pas réellement le garantir. Et de principe, le jeune homme préférait largement se méfier de ce que Edwin disait. Surtout que l’homme ne se contenta pas de cela, malheureusement. Ça irait encore s’il disait simplement qu’il était navré pour Obéron Gabet, mais en prime il ajouta que c’était une raison de plus d’agrandir la famille et donc de marier sa sœur. Est-ce que ça le regardait sérieusement ? Non, ça ne le regardait en aucun cas, il n’avait ni son mot à dire et surtout il n’avait pas du tout intérêt à penser que ça puisse le concerner d’une quelconque manière.

« Ma sœur se mariera quand ça sera le moment qu’elle le fasse. » Bon, cela dit, Gaspard n’avait pas forcément son mot à dire non plus sur la manière dont sa sœur avait l’intention de vivre sa vie, mais il était en tout cas plus légitime d’avoir un avis que son interlocuteur. « Il ne faut jamais précipiter les choses. »

Et même si Giselle avait eu quelqu’un en vue, ce qu’il ne pensait pas être le cas – même s’il se trompait peut-être –, le jeune homme se doutait qu’elle n’était pas forcément dans les meilleures conditions pour avoir envie de se marier. Gaspard lui-même n’était pas complètement serein depuis la mort de leur père, alors que sa relation avec Obéron était quand même bien plus difficile. Giselle tenait bien plus à leur père que lui, à la base, alors elle avait besoin de plus de temps pour s’en remettre. Et ça arrangeait plutôt bien les affaires du jeune homme qui ne se sentait pas prêt à voir sa sœur se marier à quelqu’un.