S'en prendre à un enfant, c'est s'en prendre à sa mère. (Manon <3)

Q

uand il était question de son passé, de sa vie, de ses ambitions, Manon n'avait que des doutes et des craintes, incapable de savoir exactement ce qu'elle voulait, ce qu'elle tenait à considérer pour acquis et ce qu'elle voulait mettre de côté... Elle n'avait qu'une seule certitude, absolue en diable, qu'un seul véritable point d'ancrage, et c'était Ena. Quand elle posait ses yeux sur elle, le doute n'était tout simplement pas permis. Elle voulait passer sa vie avec cette femme, elle voulait tout faire pour elle, elle voulait la soutenir, elle voulait tout faire avec elle et pour elle. Cette certitude était profonde, douce, évidente, et elle lui faisait dire qu'elle serait toujours là pour elle sans avoir à hésiter un seul instant, sans ciller. Manon avait trouvé en la belle dragonnière son âme soeur, et ensemble - et seulement ensemble - il était certain qu'elles iraient très loin.

Elle voulait faire partie intégrante de tous les projets de la jeune femme, mais elle aurait tout à fait pu comprendre, bien sûr, que ce ne soit pas chose possible : après tout, quand il était question de son dragon, la place que Manon occupait dans l'affaire devenait tout à coup plus incertaine. Malgré tout, Manon pouvait compter sur Ena pour la convaincre et la rassurer une bonne fois pour toutes. Elles feraient tout côte à côte, et c'était ensemble, main dans la main, envers et contre tous, qu'elles avanceraient et se ligueraient contre l'adversité. Rien ne les arrêterait, et c'était d'autant plus sûr qu'elles étaient là toutes les deux... le monde à leurs pieds si elles le décidaient... et c'était une chose que Manon avait bien envie de décider en effet.

-J'en suis sûre, répondit Manon avec une certitude nouvellement acquise.

Si Ena lui assurait qu'elle pourrait toujours compter sur elle alors, oui, Manon la croyait, sans aucune hésitation, sans crainte d'être trahie ou trompée. Il n'y avait qu'une seule personne au monde qui saurait pleinement avoir sa confiance, et c'était définitivement elle, maintenant, plus tard, n'importe quand. Elles étaient soudées, et s'il n'était jamais un mal de le rappeler, c'était tout de même une certitude devenue impérieuse. Et dont Manon était loin, bien loin de sous-estimer la valeur.

-Je suis prête à faire tout ce qu'il faudra, je suis prête à y consacrer tout mon temps et mon énergie. Tout ce que je veux, c'est vivre ton rêve. Parce que s'il compte autant à tes yeux, il deviendra forcément le mien également.

C'était sans doute une réaction trop dépendante, et elle s'en rendait compte, mais peu importe, elle ne saurait l'exprimer d'une autre façon... Et elle pensait qu'Ena comprendrait forcément, et surtout saurait lire l'amour inconditionnel qui transparaissait à travers ces propos.

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M

anon ne reprochait pas à Ena d'avoir des objectifs et des désirs qui la dépassaient, et de très loin. Elle ne lui en voulait pas d'être ambitieuse et conquérante. Comment le pourrait-elle ? C'étaient ces qualités mêmes qui faisaient qu'elle l'aimait autant, c'étaient ses qualités qui lui avaient fait se rendre compte qu'elle était folle amoureuse d'elle. Alors elle ne demandait pas de passer au premier plan, même s'il était vrai que Manon réalisait que son monde se réduisait quelque peu à Ena. Oui, elle aimait le pouvoir, oui, elle voulait récupérer la couronne des Pendragon... Mais elle s'en serait passé. Cela lui aurait bien convenu, de vivre une vie simple, sans couronne, sans dragon, sans trône. Juste Ena et elle, ensemble à tout jamais. Mais elle oubliait bien vite ces considérations quand elle se retrouvait auprès de la jeune femme, plus encore quand cette dernière lui assurait, avec douceur et un regard qui la faisait complètement fondre, qu'elle était son rêve.

Pouvait-elle la croire sur parole ? Peut-être pas, mais Manon avait la faiblesse de le faire, quoi qu'il en soit. Parce que personne ne comptait plus à ses yeux que la femme qui partageait sa vie et son lit. Ena était son rêve, à elle aussi. Avant elle, elle n'avait plus rien, elle n'était plus rien. Elle était une hère privée de mémoire, qui ne savait pas exactement dans quelle direction mener sa vie. Elle n'avait aucune forme de certitude, elle n'avait rien, elle ne savait rien. Elle était perdue, tout simplement. Et Ena l'avait aidée à trouver son chemin. Aussi, c'était rassurant de l'entendre dire qu'elle était son rêve, à elle aussi, c'était réconfortant de penser qu'elles étaient l'une comme l'autre convaincues de leurs sentiments respectifs. Et c'était ce qui faisait qu'elles iraient loin, c'était ce qui faisait qu'elles viendraient à bout de tous les défis, peu importe leur nature. Après, elle pensait honnêtement qu'Ena n'avait pas forcément besoin d'elle pour vivre ses propres rêves... ce qui ne l'empêchait pas d'être heureuse et rassurée qu'elle en ait décidé ainsi. Ena réussirait tout ce qu'elle entreprendrait, avec ou sans elle, parce qu'elle était suffisamment forte pour cela. Et la jeune femme l'aimait pour cette raison.

-Je serai toujours là, quoi qu'il arrive, répondit-elle avant de venir déposer ses lèvres sur les siennes. J'irai toujours ou tu iras. Et je ne t'abandonnerai jamais.

Elle prononçait ces mots comme une promesse. Car c'en était bel et bien une. Quoi qu'il puisse advenir, la jeune femme resterait toujours aux côtés d'Ena, et ne l'abandonnerait sous aucun prétexte. Comment le pourrait-elle, en même temps ? Elle ne pouvait pas vivre sans elle, purement et simplement.

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M

anon esquissa un fin sourire quand Ena la remercia, sourire qui disparut entre ses lèvres quand Ena lui rendit son baiser. Elle l'aimait tellement... C'était presque insoutenable d'aimer autant une autre personne, et en même temps, elle se sentait tellement bien ainsi ! Elle avait le sentiment de pouvoir soulever des montagnes, et c'était un sentiment qui se confirmait de jour en jour. Elle n'avait pas idée de ce qu'aurait été capable de faire la Manon d'avant, celle dont la mémoire n'avait pas encore été effacée, mais elle doutait fort qu'elle ait été capable d'un tel courage et d'une telle volonté. Et ça ne lui venait pas de nulle part.

Si elle était aussi forte, aussi déterminée, c'est parce qu'Ena était là, à ses côtés. Elle lui donnait une raison de vivre, de se battre, d'exister, de s'imposer. Elle faisait d'elle une femme à part entière. Elle ne la négligeait jamais, elle lui offrait son coeur sans restriction. Manon avait parfois peur de ne pas suffire à Ena, parce qu'Ena était parfaite à ses yeux, mais quand elle la remerciait, quand elle l'embrassait, quand elle prenait son visage entre ses mains, quand elle plongeait son regard dans le sien... Plus aucune de ces appréhensions n'avait encore lieu d'être. Il n'y avait plus que l'amour. Un amour profond, réel, intense, inconditionnel. Ce quelque chose de vrai et d'inexplicable que tant d'autres ne connaîtraient sans doute jamais, et qu'Ena savait résumer en mots mieux que personne.

Elles se donnaient la force de tout accomplir. Ensemble, elles pouvaient aller au-delà de ce qu'elles auraient sans doute pu espérer accomplir en étant chacune de leur côté. Ce n'était pas une certitude, bien sûr, mais Manon y croyait, elle y croyait sincèrement, et elle aimait ressentir que quand Ena lui adressait ces mots, elle y croyait tout autant. Elles ne se trompaient pas, elles ne se dupaient pas. Elle étaient purement et simplement honnêtes, autant qu'elles pouvaient l'être. Et cette sincérité, d'ailleurs, participait de leur capacité à aller toujours plus loin, toujours plus haut. Ensemble, elles étaient fortes, elles étaient inarrêtables. Ensemble, elles pouvaient accéder à tout. Il ne fallait juste pas qu'elles se remettent en cause l'une et l'autre.

-Tu n'aurais pas besoin de moi pour tout accomplir, répondit tout de même Manon, avec sincérité. Tu es la personne la plus forte que je connaisse, tu vaux cent chevaliers, mille tête couronnées. C'était la vérité. Bien sûr, Manon manquait cruellement d'objectivité, mais cela ne l'empêchait pas de parler avec le coeur, et ses mots, le moindre d'entre eux, elle les pensait avec l'honnêteté la plus crue. Ena était une femme exceptionnelle. Mais je suis heureuse de te rendre plus forte, de pouvoir faire partie de ton histoire, et de partager tes exploits.

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E

na avait beau assurer à Manon que ses exploits seraient les leurs, la servante de la reine avait peine à le croire et à l'intégrer. Ce n'était pas qu'elle cherchait à se rabaisser ou à se mettre de côté, mais elle n'avait pas le sentiment d'être sur un pied d'égalité avec Ena. Ce n'était pas une chose qu'elle lui reprochait, loin de là, et elle vivait très bien cet état de fait, mais cela restait tout de même une chose qu'elle ressentait, et qu'elle pourrait difficilement nier. Elle était heureuse de faire partie intégrante des grands projets d'Ena, et elle adorait pouvoir y jouer un rôle à part entière, plus important que tous les autres. Mais en attendant, c'étaient les ambitions d'Ena qu'elle tenait à servir bien plus que les siennes. Car sans la belle dragonnière, elle ne serait que cette pauvre chose amnésique, sans projets ni ambitions.

Elle s'était mise au service de la reine parce qu'elle savait que cela permettrait à Ena d'avoir un accès privilégié à la Couronne et à ses secrets, elle convoitait le trône parce qu'elle savait qu'Ena rêvait de s'y asseoir et qu'elle estimait que personne n'en était plus digne qu'elle. Mais tout cela, c'étaient des visions, des pensées, des rêves qu'elle avait construits en fonction de la femme qu'elle aimait. Et cette dernière ne l'avait certainement pas attendue pour les ressentir. Ce n'était pas un reproche, c'était un constat, et un constat qui ne la dérangeait pas le moins du monde.

Le sourire de Manon s'élargit quand Ena lui assura qu'elle ne faisait pas simplement partie de son histoire. Elle était son histoire. C'était parmi les mots les plus tendres qu'elle pouvait entendre de la part de celle qu'elle aimait plus que tout et que, par la force des choses, elle mettait sur un piédestal. Elle adorait entendre ces mots et savoir qu'Ena les pensait vraiment, car en cet instant, elle était convaincue du fait que la belle dragonnière ne lui mentait pas et était totalement honnête à son adresse. Complètement, désespérément honnête.

-Et tu es la mienne, répondit Manon avant de venir déposer ses lèvres sur celles d'Ena. Elle serait bien incapable de dénombrer le nombre de baisers qu'elle avait déjà déposés sur ces lèvres. Des centaines ? Des milliers ? Qu'importe, ce ne serait jamais assez. C'était la façon la plus crue, la plus nue de lui exprimer de façon très exacte l'ampleur de ses sentiments pour lui. Et ces derniers étaient capables de déplacer des montagnes, en réalité. Je me demande souvent ce que je serais devenu si je ne t'avais pas retrouvée, et quoi que je m'imagine, ce n'est jamais rien d'heureux.

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M

anon devrait cesser de se poser des questions sur ce qui se serait passé dans d'autres circonstances, dans une autre dimension. A quoi bon s'interroger puisqu'ici et maintenant, elle avait précisément tout ce qu'elle voulait et avait toujours voulu ? Même quand elle ne se souvenait plus le vouloir. Et puis, existait-il seulement une dimension dans laquelle Manon et Ena ne se retrouvaient pas ? La jeune femme n'avait définitivement aucune raison de le croire... Surtout pas alors que les propos de la belle dragonnière abondaient très précisément dans son sens et ne faisaient jamais que l'en convaincre encore davantage, pour son plus grand bonheur. Oui, c'était sûrement le destin. Ce devait être écrit quelque part. Dans le ciel, dans les étoiles, qu'importe... Elles étaient destinées, un point c'est tout. Elles étaient faites l'une pour l'autre. Leurs âmes se répondaient si parfaitement qu'elles ne pouvaient tout bonnement pas en douter. Elle pourrait perdre la mémoire cent fois et recommencer cent fois encore, ça n'y changerait tout de même rien. Ce serait toujours elles, ensemble, face à l'adversité.

-Oui, c'est impossible autrement, confirma Manon.

L'on racontait bien souvent que chaque être avait son âme soeur quelque part, et qui l'attendait, ne pas la rencontrer, ne pas former le couple que l'on était supposé fermer, c'était un peu comme allait à l'encontre de son destin. C'était absurde, ça n'avait aucun sens, mais elles avaient définitivement échappé à cet écueil. Elles pouvaient être fières et heureuses de ce qu'elles avaient réussi, et encore plus fières de ce qu'elles réussiraient, et c'étaient des choses qu'elles ne pouvaient définitivement devoir que l'une à l'autre.

-Je me demande quoi d'autre est écrit, ajouta-t-elle avec un léger sourire.

Est-ce que tout l'était ou non ? Est-ce que notre destin était tracé d'avance ? Ou bien gardait-on sa part de liberté. Les grandes lignes de nos vies et de l'histoire étaient-elles observables quelque part, pour peu que l'on sache regarder ? Bien des prophéties s'étaient déjà exaucées par le passé, d'autres se réaliseraient encore. Ce semblait certain, et même évident, au fond. Cela ne signifiait pas pour autant que tout l'était malgré tout, mais ce restait un signe, un indice, auquel on ne coupait pas, trop certain, trop évident, pour ne pas envisager d'y faire face, ne serait-ce qu'un peu.

-A quoi notre avenir va ressembler, selon toi ?

Oh, elle en connaissait déjà les grandes lignes, mais elle ne se lasserait jamais de refaire le monde avec la femme qu'elle aimait. C'était aussi cette certitude, l'assurance d'aller le plus loin possible qui rendait leur relation à ce point forte et fusionnelle, le genre de relation contre laquelle on ne peut lutter.

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Q

uand Manon écoutait Ena parlait, elle buvait littéralement ses paroles, et elle avait envie d'y croire plus qu'à quoi que ce soit d'autre en ce bas monde. Est-ce que, pour autant, elle était complètement crédule ? Non, bien sûr que non. Elle espérait que les choses se passeraient pour le mieux pour elles, et qu'elles iraient au bout de leurs ambitions, mais loin d'elle l'idée de s'imaginer que tout serait un long fleuve tranquille pour autant. Obtenir le pouvoir, c'était une bonne chose, et Manon voulait de tout coeur croire qu'elles y parviendraient, mais quand bien même ce serait le cas, cela ne leur rendrait pas la vie plus sereine. Il y avait même de bonnes chances pour que ce soit l'inverse : leur position attiserait les convoitises, et d'autres ourdiraient la prise du trône comme elles le faisaient en cet instant.

Bien sûr, il serait des plus agréables que d'avoir la richesse, l'influence et le pouvoir, mais est-ce que le bonheur irait totalement avec, est-ce que leurs amours interdites seraient tout à coup parfaitement acceptées sous prétexte qu'elles le décideraient : Manon n'était pas capable d'y croire ne serait-ce qu'un seul instant. Elle voulait croire qu'elles seraient heureuses, puisqu'elles seraient ensemble, mais par bien des aspects, elle savait que leur futur ne ressemblerait jamais complètement à ce charmant, séduisant tableau qu'Ena lui dressait. C'était ainsi, c'était juste impossible, et il fallait l'accepter. Ce n'était pas la chose la plus simple à accepter, certes, mais ça restait la réalité, et il fallait la regarder en face, mais pas maintenant, pas comme ça.

-N'importe qui affirmerait la même chose, je dirais qu'il est fou, ou naïf. Elle esquissa un sourire. Mais je crois en toi, alors si tu dis que les choses se passeront ainsi, eh bien j'y crois, assura-t-elle. Elle laissa passer un temps de silence avant de reprendre. Moi je nous vois conquérir de nouveaux territoires, posséder plus d'or qu'il ne nous sera jamais possible d'en dépenser, nous aurons les plus belles tenues, des serviteurs pour chaque tâche quotidienne... Peut-être finirons-nous même par nous marier et avoir des enfants, qui sait ?

Quitte à rêver, autant rêver en grand, n'est-ce pas ? Bien sûr que Manon savait pertinemment que rien ne serait si simple, que rien ne l'était jamais. Mais leurs rêves étaient une chose qu'on ne pourrait jamais leur ôter, et ils étaient un moteur ce qu'il y a de plus puissant. Elle préférait parler en vrac de tout ce qu'elle aimerait accomplir, même si c'était impossible, plutôt que de se limiter sans franchement de raison. Elles en étaient au stade de planifier leur bonheur, alors après tout, pourquoi pas ?

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na s'en voulut un peu d'aborder ce sujet qui, quelque part, lui tenait à coeur mais pourrait ne pas être du tout dans les envies ou dans les perspectives de Manon. La jeune femme était si amoureuse d'Ena qu'elle ne pouvait s'imaginer vivre sa vie sans elle, et le fait est que, dès lors qu'elle avait recouvré la mémoire, l'envie, le besoin même, de fonder une famille avait été plus fort que tout le reste, elle avait été convaincue, quand elle trouverait la personne avec qui elle passerait le reste de sa vie, que les choses se passeraient ainsi. Sauf que maintenant, elle devait combiner avec le désir infini de liberté de celle qui avait dérobé son coeur : l'une sédentaire, l'autre nomade... Elle savait qu'elle avait peut-être mis un pied où elle ne devrait pas.

Cependant, Ena s'était montrée douce et attentive, et même un fin sourire avait décoré ses lèvres. Seulement, sa réponse n'était pas tout à fait satisfaisante. Ce n'était pas vraiment une confirmation, c'était juste... presque une dérobade, en réalité. Ena se contentait de lui dire qu'elle obtiendrait tout ce qu'elle désirait, sauf que ce n'était pas comme ça qu'elle l'envisageait. Ce n'était pas le moins du monde ainsi qu'elle voyait les choses. Toutes les décisions qu'elle prenait devaient l'être en fonction d'Ena. C'était peut-être une vision assez limitée des choses, mais Manon ne réussissait pas à le considérer d'une autre manière que celle-ci.

-Mes souhaits dépendront toujours des tiens, Ena, je ne demanderai pas à obtenir une chose qui ne te plairait pas ou ne te conviendrait pas.

Et si elle devait accepter le fait de renoncer à ce qu'elle avait cru être ses projets de vie pour Ena, elle n'hésiterait pas le moins du monde, vraiment pas. Elle était prête à tout pour Manon. La preuve, c'est qu'elle embrassait des plans dans lesquelles elle n'aurait pas cru autrement, et acceptait de faire des concessions qu'elle ne se serait jamais vue faire, et même d'accepter de trahir, chose qu'elle n'aurait jamais imaginée. Manon se sentait prête à tout pour Ena, et peu importe ce qu'elle abandonnait de ses propres projets dans le processus.

-On arrivera à tout, puisque tu es là, ajouta-t-elle avec douceur avant de déposer ses lèvres sur celles de son amante.

Elle ne dit rien de plus, à quoi bon ? Elles pouvaient soupirer après leurs projets encore et encore, ce n'était pas ainsi qu'elles les concrétiseraient. Si elles voulaient vraiment s'assurer de mener la vie dont elles rêvaient, il ne suffisait pas qu'elles rêvent, elles devaient faire les choses encore autrement.

-En attendant, je mène déjà la vie dont je rêve.

Parce qu'elle avait Ena à ses côtés.

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