Ce que trompent les apparences... [pv Luca]

M

aria savait y faire avec les hommes, nul ne pourrait lui ôter cela. Certes, il y en avait pour ne pas se laisser prendre à ce petit jeu, mais elle pensait tout de même avoir assez aisément l'ascendant sur le sexe opposé. Elle ne pensait pas qu'on doive l'en féliciter, même si elle en tirait un certain orgueil, elle dirait seulement qu'elle... gérait les hommes depuis bien assez longtemps pour les connaître à peu près. Surtout, elle savait assez rapidement faire la distinction entre ceux qui ne s'y laisseraient pas prendre et ceux qui se laiseraient plus facilement influencer.

Avec Luca, ça avait été un travail de longue haleine, mais en gagnant la confiance de son défunt mari, elle avait su, dans le même temps, gagner la confiance du frère de ce dernier, et à présent, elle parvenait à entretenir cette relation de confiance et de confiance, matinée d'un soupçon d'ambiguité qu'elle aimait par-dessus tout entretenir. Vraiment, c'était un réel plaisir à ses yeux, vraiment. C'était un jeu dont elle ne pensait pas qu'elle serait capable de se lasser un jour. Mais qui sait.

Elle fit mine de frissonner quand il caressa sa joue du bout des doigts, ferma les yeux un espace de seconde, s'inventa un trouble qu'elle ne ressentait pas réellement. Elle n'avait pas forcément d'intérêt à pousser trop loin la séduction dans ce sens, mais elle reconnaissait y prendre un certain plaisir, car elle aimait ressentir l'emprise qu'elle avait sur cet homme. Certes, elle perdrait moins de temps à séduire un homme dont elle pourrait profiter de la fortune. D'autant plus qu'il serait de mauvais ton de lorgner sur le frère de son défunt mari. Elle mériterait, de très loin, une réputation déplorable et sulfureuse, mais elle s'en défendrait plutôt. Elle tenait à l'image qu'elle réussissait encore à donner d'elle pour le moment, même si cela ne durerait peut-être pas. L'abandon d'Obéron avait été un coup dur pour elle, et qui l'obligeait à tout reprendre de zéro, chose qu'elle n'avait pas forcément voulu.

-Je ne suis pas certaine, décréta-t-elle après un instant, en prenant la main qui avant cela caressait sa joue, dans la sienne, que ce soit une bonne idée.

Mais elle n'utilisait pas le ton le plus convaincu pour prononcer ces mots.

code by Mandy

L

uca était un gentilhomme, et Maria le savait, tout comme elle savait pertinemment qu'il ne se serait pas autorisé à dépasser certaines limites, peu importe ce que pouvait être la nature plus précise de ses intentions. Mais cela faisait partie du jeu, non pas de l'embarrasser mais de souligner une ambiguïté, qu'importe qu'elle soit de façade ou non, cela lui permettait de prendre un certain ascendant sur Luca (ou du moins était-ce son intention), et aussi de faire valoir sa dignité, son prétendu respect envers la mémoire de son défunt mari. Quoi qu'il en soit, sa réaction semblait avoir fait son petit effet sur son interlocuteur, puisqu'elle vit le rouge lui monter au joue. Il se montra, comme elle s'y attendait, d'une infini politesse, et elle lui répondit par un tendre sourire. Elle ne voulait pas non plus que l'embarras prenne le pas sur le ton habituel de leurs discussions. Ce serait à ses yeux contreproductif.

-Ce n'est rien, répondit-elle en baissant le regard, feignant une pudeur et une réserve qui en vérité étaient aux antipodes de son caractère, mais qu'elle avait tant et tant intégrée à ses interactions qu'elle savait que l'on pouvait véritablement être dupe. Ne t'en fais pas.

Elle laissa passer un instant de pause. Qu'il soit teinté d'un léger malaise ne la dérangeait pas. Elle, elle n'avait aucune raison d'être mal à l'aise, bien au contraire, elle avait apprécié le geste dont Luca avait fait preuve à son adresse, car elle aimait qu'on la regarde comme il l'avait regardée, avec une affection certaine. Elle espérait que l'embarras lui resterait encore un peu, quand bien même Maria ne voulait pas que ce sentiment prédomine au sein de leur relation à l'avenir. Dans tous les cas, ce qui était fait était fait, et Maria avait la ferme intention de capitaliser sur cette situation.

-Il se fait tard, je ferai mieux de rentrer. Avec douceur, elle encercla quelques secondes son poignet de ses doigts, signe là pour brouiller les pistes, bien évidemment. Merci beaucoup pour cette conversation, ça m'a fait du bien de parler avec toi.

Mais elle estimait que c'était le meilleur moment possible pour prendre congé de son interlocuteur, alors qu'une légère tension a été installée, alors que quelques non-dits demeurent en suspens. Ils auraient bien d'autres occasions de se voir et de se parler, tous les deux.

code by Mandy